Les dirigeants ouest-africains de la CEDEAO ont décidé de fermer les frontières aériennes et terrestres avec le Mali et de placer le pays sous embargo. Outre l’impact sur l’économie malienne, ces mesures devraient également avoir des conséquences au Sénégal voisin : le Mali est le premier client commercial.
Avec notre correspondant à Dakar, Charlotte Idraci
Chaque jour, des centaines de camions empruntent le corridor Dakar-Bamako, plus de 1 300 km. Un axe stratégique pour le Mali, pays enclavé largement dépendant du port de Dakar pour ses importations. Et stratégiquement pour le Sénégal : l’an dernier, selon l’Agence nationale de la statistique, 21 % des exportations étaient destinées au Mali.
« Pour le budget sénégalais ce sera extrêmement compliqué car un budget c’est des prévisions de recettes. Des recettes qui proviendraient des importations maliennes. Le Sénégal se tire une balle dans le pied. Nous sanctionnons une économie aussi fragile que l’économie malienne. Mais en imposant des sanctions au Mali, on punit aussi le Sénégal » note Khadim Bamba Diagne, économiste et enseignant-chercheur à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar.
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Depuis l’annonce des sanctions dimanche soir, Gora Khouma, secrétaire général des transporteurs routiers du Sénégal, a reçu de nombreux appels.
« Nous sommes inquiets car 80% du fret malien passe par Dakar. Le port de Dakar approvisionne le Mali. Si c’est fermé ça va nous faire du mal Il a peur de.
La suspension des échanges décidée par la CEDEAO n’affecte pas les produits alimentaires de consommation, les dispositifs médicaux ou encore les produits pétroliers.
La Mauritanie entre deux eaux
Le coup est donc dur pour le Mali, qui n’a pas non plus accès à la mer. Des quelques sorties, il reste la Mauritanie voisine. Hier, le président mauritanien s’est entretenu par téléphone avec Goodluck Jonathan, ancien président nigérian et médiateur de la CEDEAO pour la crise malienne.
Selon l’agence de presse mauritanienne, c’est Goodluck Jonathan qui a lancé cet appel. Mohamed ould Ghazouani a écouté les arguments du médiateur et a rappelé le souci de la Mauritanie de voir les frères maliens surmonter les difficultés actuelles.
Il faut dire que les relations économiques entre les deux pays sont étroites et anciennes. A 10 km au sud du port de Nouakchott il y a même un carrefour de Bamako. Le Mali utilise l’accès mauritanien à la mer pour exporter ses produits tels que la gomme arabique et importer des produits manufacturés. Les frontières terrestres sont également très utilisées, notamment pour le commerce du bétail.
La Mauritanie, de son côté, n’a d’autre choix que d’aider le Mali, explique Abdallahi Ould Awa, professeur d’économie à l’université de Nouakchott. Elle ne peut pas l’étouffer, leurs relations et leurs intérêts sont trop proches, conclut-il.
Mais la Mauritanie a aussi tout intérêt à entretenir des relations cordiales avec la CEDEAO, où elle progresse depuis plusieurs années. Notamment, en 2017, Nouakchott a signé un accord d’association avec la Commission de la CEDEAO pour accélérer l’intégration économique dans la sous-région.
Enfin, côté guinéen cette fois, Conakry – dont la junte est aussi dans le viseur de la CEDEAO – garde ses frontières ouvertes » avec ses pays frères conformément à sa volonté panafricaine Le Comité national du Rassemblement pour le développement (CNRD) l’a annoncé lundi soir dans un communiqué de la présidence guinéenne.
Les frontières aériennes, terrestres et maritimes de la République de Guinée resteront toujours ouvertes à tous les pays frères conformément à sa vision panafricaine.
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