L’un des sujets les moins commentés ces derniers jours au Cameroun, mais non moins importants, est sans doute la lettre de Jean de Dieu Momo à Maurice Kamto. Une lettre dans laquelle il invite le président du MRC à un duel. Une invitation quand même bizarre, mais connaissant l’initiateur, on ne devrait pas refléchir longtemps pour connaître ses desseins
D’abord, le président du Paddec motive son invitation adressée le 30 juin à Maurice Kamto par la lecture du communiqué publié il y a quelques semaines par son homologue du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC). Dans ce communiqué, « trois points m’intriguent et justifient la présente lettre vous invitant, respectueusement, à un échange courtois, républicain et fraternel pour les clarifier, dans l’intérêt de nos compatriotes et de nos militants res-uectifs ». justifie le non moins ministre délégué auprès du ministre de la Justice.
L’avocat recense trois sujets majeurs susceptibles de meubler l’éventuel duel avec l’universitaire. Le premier sujet déchaîne les passions depuis plusieurs semaines. Il porte sur ce que Maurice Kamto désigne par « succession de gré à gré” à la tête de l’Etat. Un vocable que Jean de Dieu Momo abhorre. « Dans un Etat hypothétique, virtuel, les faits tangibles n’existent pas, alors il me semble que l’emploi du conditionnel devrait être une prudence langagière qui aurait dû s’appliquer à vos formules hypothétiques», charge le président du Paddec.
Dévolution du pouvoir suprême
Ce dernier rappelle que la Constitution ne prédit pas une telle dévolution du pouvoir suprême. Et, note M. Momo, pour avoir travaillé pendant près d’une décennie auprès du président de la République en tant que ministre délégué auprès du ministre de la Justice, Maurice Kamto est très bien placé pour savoir que Paul Biya est un légaliste.
Autre sujet ciblé pour nourrir le débat contradictoire tant espéré par Jean de Dieu Momo : la réforme consensuelle du système électoral. Le président du Paddec note visiblement avec extase ce qu’il considère comme les contradictions de Maurice Kamto. « Je note un certain dynamisme et une évolution certaine dans ce registre, puisque vous êtes parti de la participation à l’interdiction conditionnée, en passant par le boycott pour aboutir à un appel aux inscriptions massives sur les listes électorales », se gausse-t-il.
Le président du Paddec éprouve aussi du plaisir à contrarier le président du MRC quand ce dernier disqualifie les anciens militants du RDPC pour être membres du Conseil constitutionnel ou d’Elecam. « Si tous les anciens cadres du RDPC perdent toute crédibilité pour assumer ces fonctions, quand bien même leur compétence serait avérée, vous aussi tombez sous le coup de cette injustice, puisque vous avez activement milité au sein du RDPC au plus haut sommet », assène M. Momo.
Déconvenue à la présidentielle
Il se convainc que Maurice Kamto a perdu sa lucidité depuis sa déconvenue, pour le moins prévisible d’après lui, à la présidentielle d’octobre 2018. « Vous osez qualifier, aujourd’hui, du fait de votre défaite incontrôlée, les décisions du Conseil constitutionnel de ’’forfaiture » alors qu’autrefois, dans une autre vie, vous disiez le 26 octobre 2004 que ces décisions « sont comme des dogmes », car « notre système juridique pose pour principe immuable, qu’en disant le droit, la haute juridiction, tel le pape, est habitée par la grâce de l’infaillibilité. C’est pourquoi elle parle no varietur, une fois pour toutes et ce qu’elle arrête et proclame est sans recours » », pointe celui qui confesse s’être par le passé égaré dans l’opposition radicale à Paul Biya.
La crise qui secoue le Sud-Ouest et le Nord-Ouest depuis 2016 constitue l’autre pomme de discorde entre les deux acteurs de l’opposition. Ici encore, le président du Paddec veut faire prendre son homologue du MRC dans le piège de ses propres contradictions. Ce dernier, regrette-t-il, appelle à la fois à une intervention étrangère pour la résolution de cette crise et donne « les gages du candidat qui veut ramener le Cameroun sous le joug colonial et nous faire perdre notre souveraineté ».
Ingérence plurielle étrangère
« Concernant la résolution de la crise dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, vous avez, personnellement, et à plusieurs reprises, appelé à l’ingérence plurielle étrangère, mais paradoxalement, j’ai bien noté que vous soupçonnez les mêmes étrangers de complicité avec ceux qui nous gouvernent, et que vous désignez par l’expression artisans d’une éventuelle succession de gré à gré à la tête de l’Etat camerounais », enfonce M. Momo.
Mais il est plus que probable que Maurice Kamto décline l’invitation du président du Paddec à une confrontation. La preuve : depuis le 30 juin, aucune suite ne semble avoir été donnée à cette invitation. Joint au téléphone le 13 juillet, Me Emmanuel Simh dit ne pas en savoir davantage que le journaliste. Tout au plus, le vice-président du MRC admet avoir déchargé un courrier estampillé « confidentiel”, autant dire dont il ignore le contenu. M. Bibou Nis-sack, le porte-parole de Maurice Kamto, n’a décroché aucun des multiples appels de l’auteur de ces lignes.
Eu égard aux points soulevés plus hauts, on peut facilement deviner ce que cherche à prouver le ministre Jean de Dieu Momo: qu’il joue un rôle essentiel dans la décrédibilisation de son frère Bamiléké, Maurice Kmato. Une manière de s’assurer une place dans le prochain gouvernement?
SOURCE: https://www.w24news.com