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World news – BLOG – Pourquoi les livres explosifs sur Trump ne font pas bouger sa popularité d’un cheveu

Donald Trump is the new Zeus.

Alors que paraît l’ouvrage “Rage” -titre extrait d’un propos de Trump: “Je suscite la rage” avait-il dit à Bob Woodward, le célèbre journaliste qui révéla avec son confrère Carl Bernstein le scandale du Watergate en 1974- rien ne semble perturber sa marche vers l’élection présidentielle de novembre prochain.

En tant que citoyen français témoin de multiples crashs politiques faisant suite à des révélations médiatiques, comme celui de M. Fillon, une fois la sidération passée et le peu de considération pour les faibles esprits d’outre-Atlantique remisée au placard de nos arrogances, j’aimerais tenter de discerner les raisons d’un processus qui dépasse l’entendement et toute tentative d’explication logique ayant habituellement cours en démocratie et dans la République des idées. Donald Trump est-il un joueur invétéré comme le sont souvent les entrepreneurs, provocateur sûr de sa force, risque-tout?

Le Président américain n’a pas résisté à la perspective de s’entretenir avec celui qui, depuis un demi-siècle, fait et défait les réputations des présidents américains. En dix-sept conversations téléphoniques, toutes enregistrées avec l’accord de Trump, Bob Woodward a recueilli des témoignages dévastateurs de la bouche même du président. Désormais, après quatre années de pouvoir auxquelles s’ajoutent en 2016 plus d’un an d’une campagne ébouriffante à tous points de vue, je peux affirmer que le système de pensée de Trump confronte la pensée occidentale à une série d’apories sans précédent. 

Dans un ouvrage éponyme consigné par Platon, Ménon dialogue avec Socrate et lui demande s’il est possible d’enseigner la vertu, un échange qui débouchera sur l’aporie la plus célèbre de la pensée occidentale. Vivant une époque où Trump et ses proches s’adressent à des milliards de citoyens connectés aux médias et censés leur délivrer la pensée officielle, dans une version du monde reposant sur les alternatives facts dont on sait en paraphrasant la philosophe Myriam Revault d’Allonnes[1] “que la vérité n’est plus qu’une opinion comme une autre”, la démocratie semble déboucher avec fatalité sur le Léthé, ruisseau de l’oubli des enfers décrit dans la mythologie grecque. Et il en est ainsi de la plus grande des démocraties d’opinion, celle de l’invention de la communication de masse qui a conquis le monde en vantant et vendant les bienfaits de “l’américain way of life”, celle aussi de l’idéalité de la vérité. Ne disait-on pas il y a peu que pour réussir en politique aux Etats-Unis il faut prêter allégeance au principe d’hyper-transparence et plier le genou devant la vérité révélée à la sauce ultralibérale?

En confessant à Bob Woodward, ce journaliste-symbole de l’ancien monde, celui dont les écrits ont fait chuter le système de “Tricky Dick” (“Richard l’embrouilleur”, surnom de Nixon), en lui racontant l’étendue abyssale du peu de compétences qu’il admet pour gérer les affaires de la plus grande puissance du monde, le peu de temps qu’il consacre à la compréhension des problèmes qui le minent, nous apprenons la manière dont réagit physiologiquement l’Amérique. Trump s’en contrefiche et de surcroît joue avec le système, le provoque, le détruit de l’intérieur de ses contradictions.

Pendant ce temps, se construit une industrie de l’édition américaine afin de rendre profitables les nombreux livres sur cet étrange dirigeant (plus d’un million d’exemplaires pour les livres de Woodward et de Mary Trump) sans écorner le moins du monde son image ni sa place dans les sondages. What else? Rien de rien! L’impact sur l’opinion est pratiquement nul. Comme chaque scandale censé provoquer la démission, l’impeachment, ou encore le suicide politique… Ses adversaires sont confortés dans ce qu’ils savent déjà, et ses partisans s’en fichent. Lorsqu’en France la publication d’un ouvrage intitulé: “un Président ne devrait pas dire ça” réduit à néant la capacité d’un président de la République à se représenter, aux Etats-Unis la vérité sèche sur la fine corde à linge des maigres exigences du “business as usual”. L’aporie politique s’affiche là aussi.

La presse, l’édition, les témoignages, les affaires, c’est-à-dire l’expression en tant qu’outil d’une construction de la vérité, mais également les indices de la place des valeurs cardinales de notre rationalité, n’opèrent plus. “Operator what’s wrong?” aurait beuglé de sa façon déclamatoire et de sa voix grave et cartoonesque Fred Schneider, le chanteur du cultissime groupe “The B-52’s”. Pire que les plus sombres des scenarii, le phénomène Trump existe comme la preuve démontrée, apodictique pour user des grands mots de nos lointains ancêtres athéniens, vérifiée et soumise à la réfutabilité[2], que les croyances ressuscitent aux dépens de la raison. Jusqu’ici nous en brandissions la menace. L’explosion des fake news dressait un tableau clinique inquiétant. Désormais Trump restera d’un point de vue historique, n’ayons pas peur des mots, la preuve incontestable de ce basculement aporétique!

Étymologiquement en grec le terme signifie: initiation aux mystères, c’est-à-dire aux croyances polythéistes ayant fait le lit progressif du passage aux monothéismes. La mystagogie régissait l’antimonde. Elle précéda et étrangement fit le lit de la rationalité qui nous fut révélée sous la plume de Platon et Aristote notamment. Elle provoqua une crise immense dans la Grèce du 4e siècle avant Jésus-Christ.

Or la rhétorique trumpiste promet le resurgissement de ces superstitions et autres monstres enfouis. N’aurait-il pas pu provoquer la mort de certains de ses affidés lorsqu’il affirma avec aplomb en avril 2020 qu’ingérer du détergeant tuerait le virus? Sommes-nous si loin du retour d’une nouvelle forme de sacrifice salvateur pour la démocratie américaine? Est-ce que Trump consiste en une nouvelle forme de définition du divin ? Une personnalité divine dont on admet la puissance sans s’attarder sur ses compétences; celles-ci qualifient les simples mortels. Pour lui comme pour Zeus, peu importe leurs nombreux défauts, le Trump des sondages reste à moins de 50 jours des élections américaines imperturbablement assis sur son Acropole contrairement à ce qu’annoncent certains médias français en relatant une baisse des tendances ici ou là. Une seule comparaison, que serait-il advenu de M. Fillon s’il avait affiché un identique placard des médailles de l’impensable que celui de l’actuel occupant du bureau ovale? La pensée d’une grande démocratie a basculé, ses attitudes sont inquiétantes.

Mais à mon grand regret, Trump est probablement moins “deplorable” que la façon dont a été définie la “majorité” électorale des Américains dans le processus électif, faisant qu’un candidat peut obtenir la majorité des voix au niveau national mais pas celle des grands électeurs, comme en 2016.

[1] “La Faiblesse du vrai: ce que la post-vérité fait à notre monde commun”, éditions du Seuil

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SOURCE: https://www.w24news.com

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