Olivier Véran est très remonté. « J’ai passé l’été à alerter, à dire que le virus circulait rapidement et que le nombre de malades allait augmenter. On me répondait, Mais non, arrêtez, il n’y a pas d’hospitalisations, et maintenant, que constate-t-on? Une augmentation! » Ce jeudi 17 septembre, le ministre de la Santé tient justement une conférence de presse, sur fond de regain de l’épidémie de Covid-19. Il en fera désormais une par semaine. Et promet la « transparence » sur les chiffres et la situation. C’est en tout cas sa première prise de parole d’envergure depuis la fin août. Une éternité pour celui qui fut l e visage quotidien de la crise sanitaire …
« Véran, il est passé où? », persifle un sénateur socialiste. En réalité, le ministre de la Santé s’est fait plus discret à son corps défendant. Alors qu’il devait s’exprimer après le Conseil de défense du 11 septembre pour en dévoiler les décisions, il s’est fait chiper la place au dernier moment par le Premier ministre Jean Castex. Lors de ce huis clos à l’Elysée, le neurologue de profession n’a pas été à la fête. Emmanuel Macron a retoqué sa proposition de fermer plus tôt les bars et restaurants de certaines zones rouges. « Il faut regarder si on ne peut pas jouer sur l’amplitude horaire pour Marseille, Bordeaux et la Guadeloupe », plaide alors le ministre.
Autour de la table, certains participants tiquent et lui font remarquer que les jeunes privés d’une dernière bière finiront leur soirée dans des appartements, créant de possibles clusters. Le chef de l’Etat embraye et demande sèchement à son ministre de se concentrer sur l’urgent : les tests. Les temps d’attente pour se faire tester et obtenir les résultats sont démesurément longs. Emmanuel Macron réclame des files prioritaires dans les laboratoires pour le personnel soignant, les personnes présentant des symptômes et les cas contacts. Cette demande, rappelle-t-il, il l’avait déjà formulée en Conseil de défense à la mi-août. Elle est donc restée lettre morte…
La pression sur Olivier Véran s’accroît. Son administration est sous le feu des critiques, même au sein de l’exécutif. « Le ministère de la Santé, ce n’est pas le plus réactif, grince une ministre. Les tests antigéniques, les tests salivaires, les homologations, ça traîne… Il y a une partie de ce ministère qui ne semble pas être en état d’urgence ».
Un autre membre du gouvernement ajoute : « Est-ce le bon ministère pour gérer des questions de logistique ? ». Un autre souffle : « les agences sanitaires sont très désorganisées, c’est agaçant ». Dans le viseur : Santé publique France, l’agence nationale de santé publique, et surtout les agences régionales de santé (ARS), en première ligne sur les tests. « Les administrations sont hyperpuissantes à la Santé, très difficiles à faire bouger », déplore un conseiller de l’exécutif. N’en jetez plus !
Ces critiques mettent le patron hors de lui. « Mon administration a été capable de procéder à des évacuations sanitaires en un temps record, avec des trains médicalisés, rétorque Olivier Véran. Nous sommes passés à 1,2 million de tests par semaine, donc plus que l’objectif fixé initialement. En six semaines, on a aussi signé avec tous les syndicats le Ségur de la santé. »
Mais, en privé, le ministre a souvent fait part de son mécontentement à ses proches sur les dysfonctionnements de Santé publique France et sa perplexité sur les choix sanitaires défendus par la Direction générale de la santé. Parallèlement, il a déjà convoqué les cadres de l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP) dans son bureau pour taper du poing sur la table.
Pour faire sauter les verrous, Véran fait aussi chauffer le téléphone. Le week-end dernier, il a appelé des laboratoires privés et publics, des experts habitués aux plateaux de télévision pour comprendre pourquoi le circuit de dépistage est aussi embouteillé. « Certains labos manquent de réactifs alors que le voisin en avait plein. Il faut des cellules de coordination par territoire et faire travailler davantage le privé et le public ensemble », soupire Olivier Véran. Un ministre qui n’est pas au bout de ses peines.
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