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Voici pourquoi La réponse aux problèmes économiques du Cameroun est politique

Huit ans après que le rapport «Cent propositions à sortir» a été soumis au gouvernement en 2012, les propositions ont depuis été reportées au calendrier grec, le Groupe interprofessionnel des employeurs «GICAM» a été ajouté au «Livre blanc sur l’économie camerounaise – les impératifs industriels camerounais» Récemment, il a été soumis [19 octobre 2020] au Premier ministre. Les mêmes causes produisent les mêmes effets, nous craignons profondément que ce document subisse le même sort.

En effet, les éditeurs n’échapperont pas à la condamnation des réformes économiques précédemment réclamées dans le Livre blanc, car elles entrent en conflit avec le système institutionnel existant qui les considère comme une menace pour le statu quo et ses bénéficiaires. Un système institutionnel avec le moins d’intérêt pour sa mise en œuvre. C’est la principale raison de l’échec de nombreuses réformes qui ont été réclamées depuis près de trois décennies par diverses organisations nationales et internationales, dont entre autres la Banque mondiale et le Fonds monétaire international pendant la période d’ajustement structurel et jusqu’à présent (de 1995 à nos jours), La proposition du GICAM à Emerge (2012), la plateforme de dialogue public-privé pour l’amélioration de l’environnement des affaires proposée par la Banque mondiale et la SFI, est mieux connue sous le nom de Cameroon Business Forum (CBF) (2010-2020). Le succès de la Force frontalière combinée devait être mesuré par l’amélioration du classement du Cameroun dans la note Doing Business du Groupe de la Banque mondiale. Le contraire s’est produit alors que le classement du Cameroun dans les affaires continuait de se détériorer. La Common Border Force est devenue une structure fonctionnelle au détriment de l’amélioration de l’environnement des affaires. Je doute fort que la remplacer par une autre structure de la même structure institutionnelle soit une cure de jouvence.

En 2003, l’enquête de la Banque mondiale sur le climat d’investissement menée par les chefs d’entreprise au Cameroun a mis en évidence les principaux facteurs qu’ils ont identifiés comme des obstacles à l’amélioration de l’environnement des affaires, parmi lesquels on note le manque d’infrastructures (énergie, transports), la complexité du système fiscal, la corruption … pourtant Dix-sept ans, nous devons admettre que ces facteurs se sont considérablement aggravés. Cela a contribué à la mort de nombreux projets dans les secteurs minier et industriel.

Sans diminuer le rôle de l’État dans le secteur productif, le GICAM souhaite le voir comme un facilitateur plutôt qu’un acteur direct de la production, notamment à travers la création d’une infrastructure et d’un environnement institutionnel qui encourage l’investissement, la production et l’entrepreneuriat. C’était précisément l’une des principales recommandations de réforme structurelle demandées par le PAS. Les observateurs économiques camerounais n’ont pas échappé à l’observation qu’une fois le point d’achèvement douloureusement atteint en 2006 dans le cadre de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (IPPTE), le gouvernement a fait exactement le contraire. Par l’extraordinaire frénésie de l’intervention de masse de l’État. Cela a contribué à accélérer la dette publique pour financer, entre autres, le financement des éléphants blancs tels que les tracteurs Ebola actuels dans les broussailles, l’usine de manioc de Sangmelima sans manioc, un abattoir de volailles à Bafang sans poulet, le barrage hydroélectrique de Mekken d’une capacité de 25 mégawatts, dont le coût est déjà prohibitif de 25 milliards. Le franc CFA en 2011 approche actuellement les 100 milliards sans faire fonctionner le barrage … la liste est longue.

Parmi les autres préconisations du rapport, on pourrait citer la réforme du système judiciaire pour souligner que les dévoiements de celui-ci sont constamment indexés dans les rapports internationaux comme l’un des principaux facteurs de dissuasion des investissements au Cameroun.

De même le rapport relève la nécessité de l’approfondissement de l’intermédiation financière par l’élargissement du spectre des instruments et produits mieux adaptés aux besoins de l’économie. Il n’aura pas non plus échappé aux auteurs du rapport qu’au lieu de créer une nouvelle banque publique des PME au sort incertain et douteux, il aurait été préférable d’adapter les missions de la Société nationale d’investissements (SNI), holding public d’investissements créé il y a plus de 55 ans, disposant d’actifs financiers et immobiliers, d’en revitaliser le management pour lui fixer un nouveau cap aux fins de relever les défis nouveaux de financement de l’économie, résultant des évolutions de notre environnement mondial, national et régional.

La crise sanitaire résultant du COVID-19 est une autre occasion de voir l’incompétence de notre système de gouvernance à apporter les soutiens requis aux ménages et aux entreprises exposées aux effets néfastes de cette pandémie, en dépit des fonds importants mis à sa disposition par la coopération internationale multilatérale et bilatérale.

Dans son allocution de la fin d’année 2013, Paul BIYA s’étonne, comme le commun des mortels, du paradoxe entre le riche potentiel de notre pays et l’atonie de ses performances. C’est un véritable tragédie de leadership que les spécialistes observent en cette fin d’année où le leader avoue son incompétence. Car en réalité le leadership politique camerounais avait failli dans l’impératif de réformer les institutions politiques du pays pour les adapter aux enjeux et défis préconisés par les réformes structurelles dans le cadre des ajustements. Sur ce plan, les choses se sont aggravées, le pays n’ayant pas entrepris le changement de paradigme institutionnel qu’imposaient les défis et les enjeux du moment.

En réalité, l’organisation et le fonctionnement de l’Etat n’avaient pas changé. En effet, pour que la nouvelle vision porte des fruits, chaque acteur devait en respecter la répartition prescrite des rôles, dont l’une des vertus était de ne plus exposer l’Etat, comme autrefois, aux risques propres des entrepreneurs. Les entreprises s’engageraient dans la production et paieraient les impôts à l’Etat pour lui permettre de financer les infrastructures sociales et économiques, tout en créant des infrastructures physiques et institutionnelles au bénéfice des entreprises et des ménages.

Or, abandonnant son rôle d’arbitre, l’Etat s’est remis graduellement à jouer, c’est-à-dire à investir et à prendre des risques dans les secteurs productifs, dès les premiers signaux de la diminution de l’endettement public. Il s’en est suivi un déroutement du modèle préconisé qui a conduit au grippage de nombreux moteurs et ressorts de la croissance, en bridant la concurrence, l’initiative, l’innovation et l’émulation des talents. Ce phénomène est également attesté par la détérioration continue des entreprises publiques ou parapubliques – CAMTEL, SNI, SNH, DSX, CHANTIER NAVAL, etc. – qui sont devenues une source d’appauvrissement continue au détriment de la collectivité.
La déliquescence économique et sociale du Cameroun est en cohérence avec les résultats des meilleures recherches en matière de développement, notamment sur les raisons de l’essor et du déclin des nations. Ces recherches ont établi une forte corrélation entre la qualité des institutions politiques et la dynamique de prospérité ou de pauvreté. A cet effet, des institutions politiques inclusives créent des incitations favorables à l’émergence d’institutions économiques performantes, tandis que des institutions politiques extractives, marquées par le penchant à la rente et à la prédation génèrent des stimulants pour le développement d’institutions économiques enclines à l’immobilisme et aux manœuvres de corruption.

L’interrogation que pose le GICAM au chapitre 3 du Livre blanc « Plaidoyer pour un Etat-stratège et un dialogue économique et social rénové et efficace » (p. 149) sur le type de société que nous voulons être : « Est-il pertinent de continuer à être des sociétés de rentiers et consommateurs en bout de chaîne ? » ou « Ne serait-il pas mieux de devenir des sociétés de producteurs ou de créateurs de valeur dans tous les domaines de l’aventure humaine ? » est la question capitale de cet ouvrage, et elle est essentiellement politique, car sa réponse engage notre avenir. De sa réponse également découleront de nombreuses orientations en matière d’éducation, de stratégies économiques ou industrielles.
Le deuxième scénario qui semble clairement l’option du GICAM est sous-tendue par la promotion des valeurs de remise en cause, d’innovation et créativité qui sont les traits de l’entrepreneur. Ces valeurs sont manifestement aux antipodes des pilotes qui tirent la dynamique institutionnelle actuelle du Cameroun, caractérisée essentiellement par le maintien du statu quo, la promotion d’une culture d’extraction de rentes, de passivité, de résignation, de fatalisme…

En conclusion, si l’industrialisation du Cameroun est un impératif, alors l’urgence doit être davantage l’édification d’institutions politiques inclusives, promotrices d’une société de confiance, de courage, d’audace et de liberté. Ce n’est qu’à ce prix qu’émergeront une véritable race d’entrepreneurs et de capitaines d’industries mus par l’innovation, la créativité et la remise en cause, vertus propres des entrepreneurs. Pour le moment loin s’en faut ! Georges Clémenceau, homme d’Etat Français, disait que la guerre est une affaire trop sérieuse pour la confier aux seuls militaires. Dans cet ordre d’idée, nous serions enclins à dire que l’industrialisation est un enjeu politique trop important pour la ravaler à un débat technique. C’est une question hautement politique.

REF:camerounweb.com

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